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6 mars 2011

Laurent GAUDÉ (1972) – (Ouragan 2010)

Laurent GAUDÉ (1972) – (Ouragan 2010)

 

Le cadre dans lequel Laurent GAUDÉ a situé son roman, nous le connaissons pour avoir suivi la transformation, en quelques jours, d’une tempête tropicale en un cyclone qui approchait du Golfe du Mexique et se dirigeait vers le sud les États-Unis d’Amérique, en cette fin du mois d’août 2005. La presse quotidienne et les journaux télévisés  nous ont largement diffusé les images transmises par les satellites de la progression de Katrina. L’évacuation spectaculaire de la ville de la Nouvelle-Orléans, les autoroutes saturées, immobilisées, la pénurie de carburant, les camps de fortune, les conditions insalubres du regroupement des pauvres gens dans le stade couvert rien ne nous a échappé. Au passage de la tempête, quelques vidéos témoignaient de la rage du vent, de l’importance et de la violence des pluies touchant l’état du Mississipi, la Louisiane et l’Alabama, ravageant la zone la plus peuplée, la Nouvelle-Orléans. Et puis, les crues provoquées par l’ouragan ont envahi le delta. La force et l’abondance des eaux ont détruit les digues. Le lac Pontchartrain, qui surplombe la ville, s’est déversé sur la métropole du Sud, noyant ses bas quartiers.

Le monde entier a pu suivre la polémique au sujet de la lenteur de réaction du Président républicain de l’époque, John W. Buch. Son survol sommaire des lieux à bord d’un hélicoptère a soulevé une controverse sur l’interprétation de son attitude. 

De nombreux agents des services municipaux et d’ordre public ont été rapidement accusés de sauver d’abord leur peau ou d’abandonner à leur sort les communautés les plus pauvres, en grande partie des Noirs.

 

Les personnages du roman : Laurent GAUDÉ, a pris le parti de s’intéresser aux laissés-pour-compte de la société, aux plus démunis, à ceux qu’on a oublié. Ils sont six. Cinq sont Noirs. Nous les suivons tour à tour avec lui dans différents points  de la Nouvelle-Orléans.

Volonté d’acier trempé dans une carcasse décharnée, Joséphine Linc. Steelson « négresse depuis presque cent ans » est fière de presqu’un siècle de conquête de sa dignité. Quitter la ville, c’est aller mourir ailleurs, loin du bayou où Vieille_femme_noire_drap_e_dans_la_banni_re__toil_eMarley, son mari a été massacré dans une rixe avec des Blancs. Ses enfants sont morts. Elle est seule au monde. Joséphine se cache. Elle partira... peut être... si elle veut... quand elle voudra...

Le corps harassé par le travail répétitif, les oreilles résonnant encore du bruit infernal des machines suintantes de pétrole, Keanu Burns a fuit d’une plate-forme pétrolière du Golfe. Fou d’horreur, il est obsédé ne pas avoir pu sauver son camarade écrasé et brûlé vif dans un accident du travail. Le hurlement de la sirène d’alerte, la fournaise, les images et les appels du supplicié en flammes le poursuivent, le torturent jour et nuit, lui font perdre la raison. L’annonce de l’arrivée de l’ouragan sur la ville a mis fin à sa décision d’en finir. Quelqu’un a besoin de lui là-bas. Il a retrouvé une raison de vivre. Seul à contre-courant de la débâcle des évacués, sur quatre cent kilomètres, il retourne vers la jeune femme qu’il a abandonnée six ans plus tôt pour tenter la chance.

La vie de Rose Pekerbye a basculé après le départ de Keanu. Elle méprise la jeune femme vieillie et marquée par la misère qu’elle est devenue. Sans ressources, la voilà seule à protéger Bayron, autiste, l’enfant de personne. Un enfant qu’elle n’arrive pas à aimer!

Comme tous ses codétenus du couloir d’Orleans Parish Prison, Buckeley a regardé, derrière les barreaux de sa cellule « ... le révérend qui accélère transi de peur. » dans lequel, aujourd’hui, tous ne voient « qu’un homme au pas pressé, un Blanc qui tient une bible bien serrée et porte sur le visage un air d’inquisiteur en campagne. » Comme eux, il a aboyé à son passage, haineux contre ce visiteur venu de l’extérieur, symbole de liberté. Dans leurs cellules, ils savent qu’ils valent moins que des chiens. Les autres, directeurs, gardiens, même les chiens sont à l’abri du danger. Eux restent bouclés là.

Le dernier personnage, c’est justement ce révérend. Paniqué, il a fuit la prison sous les quolibets. Il a failli à son ministère, mais Dieu a pitié de lui. Il lui donne une occasion de racheter sa désertion. Le cataclysme va lui permettre de réaliser la Mission divine.

S’appuyant sur des circonstances et quelques faits réels, Laurent GAUDÉ a fait un conte construit à la manière des romanciers américains. Le fléau qui s’est abattu sur les humains s’ajoute à leur combat quotidien, décuple leur volonté, leur force ou leur bassesse et leurs faiblesses.

Les destins se vont se croiser, s’unir, se disloquer dans l’épreuve. Keanu Burns et Rose Pekerbye se retrouvent, parlent, pardonnent, s’aiment, recouvrent leur dignité. Byron, resté seul, sort et s’aventure dans les rues inondées. L’enfant égaré dans la tourmente fera sortir de son refuge la vieille négresse. Une panne électrique favorise l’évasion de Buckeley du pénitencier noyé par la crue. La ville évacuée est livrée à la merci des neuf détenus qui « se sont fait la belle ». Évadé, mais prisonnier d’un groupe prêt à tous les crimes, il lui faudra conquérir sa liberté. Le pasteur s’interroge, impuissant face aux alligators dévorants sous ses yeux l’idiot de la paroisse. Dieu veut surement punir l’humanité ! Il sera le Bras de Dieu.

Dressée noblement drapée dans la bannière étoilée, Joséphine Linc. Steelson pourra affirmer son combat pour l’égalité, au monde entier.


            En proie aux forces maléfiques d’une nature en furie, les méchants périront dans l’épreuve, les bons en sortiront confortés, grandis. Byron fils de Quelqu’un pourra sourire et parler.

Katrina_par_NMS

Douze séquences fixent la suite chronologique du roman. Dans chacune de ces parties, Laurent GAUDÉ éclaire en sauts aléatoires tous les personnages en temps donné, passe de l’un à l’autre, puis revient sur eux. Ces paliers dans la cascade du fil du récit sont accentués par des ruptures de style. Ce sont les monologues à la première personne de Joséphine Link. Steelson et ceux du pasteur illuminé. Buckeley est le narrateur  des péripéties de la cavale des neuf prisonniers. L’auteur reprend la main quand il s’agit de Rose, Byron et Keanu. Ces écarts ajoutés au rythme vif, parfois haché, traduisent l’inconfort et l’insécurité provoqués par la furie du vent et des eaux.

La tentation de confronter la fiction à une réalité que nous avons encore présente à l’esprit, parasite la lecture de ce roman. C’est un livre très bien écrit, à garder et à relire quand le temps aura fait son œuvre. Il sera alors apprécié à sa juste valeur.

 

Les romans de Laurent GAUDÉ :

-                  Cris, 2001

-                  La Mort du roi Tsongor, 2002 ; Prix des lycéens 2002, Prix des Libraires 2003

-                  Le Soleil des Scorta, 2004 ; Prix Goncourt 2004, Prix Jean Giono 2004

-                  Eldorado,2006

-                  La Porte des Enfers, 2008

-                  Ouragan, 2010

Laurent GAUDÉ est aussi écrit auteur de nouvelles et d’une douzaine de pièces de théâtre.

 

Biographie et bibliographie :

http://www.linternaute.com/sortir/auteurs/laureats-prix-litteraires-2004/gaude.shtml

L’ouragan Katrina (30 août 2005)

http://fr.wikipedia.org/wiki/Ouragan_Katrina

                     

http://fr.wikipedia.org/wiki/Cons%C3%A9quences_de_l%27ouragan_Katrina_sur_la_Nouvelle-Orl%C3%A9ans

 

http://www.chocolat.tv/etats-unis/ouragan-katrina-nouvelle-orleans.html

 

http://www.monde-diplomatique.fr/2005/10/DAVIS/12817

 

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