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30 mars 2013

Magda SZABO (1917~2007) - LA BALLADE D’IZA (2005)

Magda SZABO (1917~2007) - LA BALLADE D’IZA (2005)

Traduction de Tibor Tarda 

     Vince ne la reconnaît plus ! Le désarroi de la vieille dame est immense.   Le mari d’Etelka Sköcs meurt d’un cancer à l’hôpital. Après l’enterrement, Etelka doit quitter sa ville natale, sa maison, ses objets familiers, ses occupations quotidiennes, ses relations. Iza a tout organisé pour son repos. Elle vivra désormais à Budapest dans l’appartement moderne et confortable de leur fille bien aimée. Désemparée, ayant perdu ses repères, se sentant inutile, la vieille dame se pétrifie dans sa non-existence jusqu’à son retour au village où elle doit faire ériger la tombe de son époux décédé.

     Certains personnages de ce roman sont fidèles aux traditions ancestrales. Ils sont respectueux de leurs origines, de la religion luthérienne et des valeurs d’un passé révolu. Ces personnes survivent ou résistent à leur manière aux bouleversements politiques qui succèdent à défaite de la Première Guerre mondiale.

     Vince a subi 23 ans de destitution professionnelle et de mise au ban de la société pour avoir refusé de condamner sur ordre, en tant que juge, des ouvriers agricoles qui s’étaient révoltés dans les années 20. Il a résisté pendant la guerre et a sauvé un juif lors d’une rafle en 1944. Il a été réhabilité en 1945.

     Passée de l’autorité bourgeoise et sectaire de la tante Emma à sa vie d’épouse de réprouvé politique et de mère d’Andrus, leur fils mort à 9 ans, puis d’Iza, son épouse Etelka, n’a jamais été maîtresse de son destin. Elle a toujours déployé des trésors d’imagination, d’économie, de débrouillardise pour faire face aux difficultés financières de la famille. L’aisance retrouvée, Etelka a conservé ces qualités qui sont devenues son moyen d’exprimer son amour et son utilité.

     Le docteur Dekker, professeur de médecine était un ami de jeunesse fidèle de Vince. Il fut nationaliste et résistant pendant la guerre. « …ce doyen qui mettait sa toque à l’envers les jours de manifestations publiques et, les jours de grande victoire allemande… »

     Guitza, la voisine du couple survit chichement dans une société athée en brodant toujours des robes de pasteurs.

     Tout en adoptant la modernité, l’ex-mari d’Iza, Antal, revendique ses origines modestes. Il a craint de se perdre en restant dans le mouvement que conduit Iza. C’est lui qui achètera la maison et le mobilier d’Etelka. Il essaiera de rendre leur chaleur compatible avec le confort moderne. Antal, qui s’est attaché au vieux couple Sköcs, sera prêt à accueillir la vieille dame chez lui, pour qu’elle entretienne sa maison.

     La destinataire de la photo du moulin est Lidia, l’infirmière dévouée qui a su écouter et éclairer les derniers jours de Vince agonisant.

     Toutes ces personnes accordent une grande importance à leur origine sociale.

     D’autres personnages sont les représentants de l’esprit de modernité effrénée voulue par le régime communiste totalitaire en place. Le credo est faire table rase du passé, en vue d’un avenir meilleur.

     Iza, la fille très aimée de Vince et d’Etelka, représente la femme nouvelle créée par le communisme totalitaire qui dirige la Hongrie depuis la fin de la Deuxième Guerre Mondiale. La jeune femme est adulée par ses parents. Elle est belle et intelligente et a réussi ses études de médecine dans d’excellentes conditions. Iza exerce son métier avec compétence, passion et dévouement total. Dès l’enfance, elle a fait preuve d’un caractère affirmé et combatif. Plus tard, elle a participé activement à la résistance antinazie. Cest une femme moderne, athée, libérée des traditions « bourgeoises » que sont les fiançailles, le mariage, les rites. Elle va de l’avant, refuse de s’épancher sur ce qui n’est plus. Dans tous les aspects de sa vie, elle rompt avec le passé, au profit de la modernité. Iza aime ses parents, mais ses manifestations d’amour sont matérielles, soumises à un calendrier. Si elle organise elle-même la vie de sa mère à Budapest, c’est pour lui épargner des soucis matériels, c’est pour son bien, pense-t-elle. Mais la vie ordonnée, structurée, qui ne laisse aucune place  au désordre, à l’imprévu, qu’elle offre à Etelka, lui apporte-t-elle pour autant le bonheur ? Quand elle s’en inquiète, Iza est incapable de l’exprimer.

     Domokos est amoureux et amant d’Iza, malgré la réserve de la jeune femme. Écrivain officiellement reconnu, il craint les entraves à sa liberté et à sa carrière. À la fois acteur et spectateur des événements qui se déroulent sous ses yeux, craignant d’être happé dans le sillage d’Iza, lui aussi fuira.

     Le lapin apprivoisé, Kapitany,  symbolise une forme de résistance de ses propriétaires. Pour ces derniers, posséder un animal de compagnie était une des rares formes de liberté dont ils pouvaient profiter dans un régime communiste totalitaire où tout était réglementé et contrôlé.

 

lapin

 

     Ce livre est traduit du hongrois. Son écriture est agréable, le vocabulaire est riche et imagé. La psychologie des personnages est fouillée. L’histoire est conduite avec habileté. Tous les personnages sont attachants. L’attention des lecteurs est soutenue constamment.

     Ce roman nous concerne tous. Il décrit des situations et des sentiments que nous avons tous éprouvés en tant qu’enfant de nos parents, que nous vivons en tant que parents ou auxquelles nous seront confrontés un jour. Il nous remémore des situations vécues. À travers le point de vue et le ressenti des personnages du récit, il nous amène à remettre en cause certaines options ou attitudes que nous avons pu avoir dans des circonstances comparables.

     Magda SZABO met en scène des personnages qui se laissent conduire par de fortes personnalités, Emmerence dans La Porte (2003), Vince puis Iza dans La Ballade d’Iza. Dans les deux romans, un animal de compagnie, le chien Viola pour le premier, Kapitany dans le second occupent une place symbolique dans le déroulement du récit.

     Le livre est publié par les Editions Viviane Hamy. Une précédente traduction du roman est parue en 1967.

roman du même auteur :

Le Faon (2008)

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9 mars 2013

Toni MORRISON (1931) - HOME (2012)

Toni MORRISON (1931) HOME (2012)

Traduit de l’anglais des États-Unis par Christine LAFERRIÈRE (1)

     Avant les premières lueurs de l’aube, serrant le col de sa veste militaire contre sa gorge, Frank court pieds nus dans la neige le long des pâtés de maisons et se présente à la porte du presbytère de l’église méthodiste africaine épiscopale. Profitant de la torpeur narcotique nocturne qui règne dans l’hôpital psychiatrique voisin, il vient de s’en évader. Comment y était-il arrivé ? Il ne s’en souvient plus. « J’étais peut-être mêlé à une bagarre ? » « J’ai dû mal me conduire. », estime-t-il, incertain. Deux jours plus tôt, il s’était retrouvé là, sanglé sur un lit, émergeant d’un sommeil médicamenteux.

Coree_guerre

 

     L’histoire se déroule dans les années 1950. Sa participation à la guerre de Corée terminée, de retour aux États-Unis, le soldat noir Frank Money ne souhaitait plus rentrer dans le village de son enfance en Géorgie. Unique survivant du trio de copains qui s’étaient engagés dans l’armée pour s’en aller loin, loin du pire endroit du monde, où il n’y avait pas d’avenir, Lotus, où il s’était promis de ne plus revenir s’y retrouver face aux proches de Mike et Stuff, morts au combat. Depuis son retour, hanté par les horreurs des affrontements avec l’ennemi, Frank Money errait, incapable de garder un travail, ni de maintenir une relation durable avec Lily, la jeune femme rencontrée à Seattle et avec qui il vivait. A la réception d’une lettre le priant de venir au plus vite au secours de sa sœur Cynthia (Cee), en danger de mort, il se lança dans un long périple rempli d’embûches, de Seattle vers Atlanta.

 

     Toni MORRISON a structuré ce court roman en alternant deux modes narratifs différenciés par leur typographie : tronçonnant le récit proprement dit, dans lequel ils s’insèrent, de courts chapitres en italique portent sur la nature de la névrose de Frank. Ce dernier y raconte ses obsessions à la narratrice : son enfance malheureuse stigmatisée par les sévices ségrégationnistes des années 30 qui l’ont chassé tout enfant avec sa famille de son Texas natal ; sa jeune sœur Cee, exutoire des ressentiments haineux de l’épouse de leur grand-père ; son besoin de fuir Lotus ; Cynthia, dont il était le seul protecteur, restée seule là-bas, incapable de se défendre ; les images insoutenables des atrocités de la guerre, compagnes de ses crises de démence. Tout au long de cette confession, des souvenirs précis se réveillent, l’auto-culpabilisation se fait jour, les secrets refoulés remontent à la surface, le récit s’éclaire.

 

     À travers les dialogues et les situations vécues par les personnages, dans un style direct, simple, concis, pudique, Toni MORRISON restitue, dans le récit proprement dit, la multitude d’obstacles qu’imposent au quotidien les lois ségrégationnistes confinant les Noirs dans la misère et l’insécurité. Elle met en évidence le dualisme des manifestations de délinquance et des phénomènes d’entraide et de partage au sein de la communauté noire, dans ce contexte de précarité de chaque instant.

 

selma

 

Home, simple roman ? ou plutôt, conte philosophique ?

 

     Où trouver un avenir, quand on habite Lotus ? Pour le frère comme pour sa sœur l’avenir était ailleurs. Ailleurs, la découverte de la part abjecte de sa personnalité a rendu Frank « cinglé ». D’ailleurs, Cee rapporte un cœur meurtri et un corps mutilé, fruits de son ignorance sociale et de sa naïveté. De retour à Lotus, grâce à l’abnégation, la solidarité, la stimulante force de caractère et la volonté de survie digne partagées par un groupe de femmes laissées-pour-compte de la communauté du village, l’un et l’autre réaliseront que c’est en eux que se trouvent les clés de leur avenir, au foyer familial (Home). Libérés du poids de leur passé et de leurs erreurs, les personnages se préparent à assumer leur destin.

La version française de Home est parue chez Christian Bourgeois en 2012.

 

1 - Christine LAFERRIÈREa fait des études de latin et de grec au lycée. Elle a choisi la spécialité du Moyen-Âge et est titulaire d’une agrégation d’anglais et d’une licence de droit. Christine LAFERRIÈRE est professeur d’anglais en banlieue parisienne. Passionnée d’étymologie, elle a appris en autodidacte, la langue tchèque, dont elle traduit des romans de fiction contemporaine.

 

Parmi ses traductions, elle a à son actif la traduction de divers textes pour des revues (Centre National de la Danse, textes juridiques, parfois philosophiques…), un recueil d’essais de John Ronald Reuel TOLKEIN (1892~1973), (The Legend of Sigurd and Gudrún, parution posthume en anglais, en 2009), La Légende de Sigurd et Gudrún l’œuvre poétique en vieil anglais du même auteur (Christian Bourgeois, parue en édition bilingue en 2010) ; Le chapeau de M. Briggs deKate SUMMERSCALE (Christian Bourgeois, 2012)

 

http://www.k-libre.fr/klibre-ve/index.php?page=auteur&id=2568

 

http://www.tolkiendil.com/tolkien/portraits/interviews/sigurd

 

Guerre de Corée :

 

http://www.larousse.fr/encyclopedie/divers/Cor%C3%A9e/114672

 

http://www.universalis.fr/encyclopedie/guerre-de-coree/

 

http://www.ina.fr/histoire-et-conflits/autres-conflits/video/CAA8000996501/la-guerre-de-coree-a-30-ans.fr.html

 

Source des photos :

 

http://www.histoire-en-questions.fr/reportage/marche/selma.html

 

http://usasegregation.unblog.fr/files/2010/03/arretdebusphotojackdelanocarolinedunord1940.jpg

 

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