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20 septembre 2012

John STEINBECK (1902~1968) – La Perle ; The Pearl (1945)

John STEINBECK (1902~1968) – La Perle ; The Pearl (1945)

Traduction de l’anglais par René VAVASSEUR et Marcel DUHAMEL (1)

     Au centre de ce roman, est une perle, une perle magnifique, énorme, la plus grosse perle du Monde. Un Indien, Kino l’avait trouvée dans le golfe de Californie. Le prix qu’il pourrait tirer de sa vente permettait maintenant à ce pauvre pêcheur de perles de formuler à haute voix ses rêves les plus fous, de faire le bonheur de sa femme Joana et de son bébé Coyotito. Il pourrait enfin savoir ce qui était écrit dans les livres, car son fils irait à l’école. Mais la perle merveilleuse est aussi une malédiction pour le propriétaire d’un tel trésor. Source d’envie, de jalousie, de cupidité, Kino est devenu l’ennemi à anéantir de toute une société.

     Ce court roman, servi par un style sans fioriture, direct, une écriture fluide, est accessible à tous. Les descriptions fabuleuses abondamment détaillées des différentes phases de l’histoire dynamisent le récit. Le cadre serein et poétique de la grève, contrasté des quartiers de la ville, aride et abrupte de l’arrière pays, renforce les impressions de paix ou d’hostilité et de danger ressenties par le héros. La lumière diffuse des brumes matinales sur la baie de La Paz crée une ambiance fantastique. Les variations symphoniques, selon la teneur des chants traditionnels intérieurs de Kino et de Joana, enrichissent l’évocation dramaturgique, dont le suspens est maintenu jusqu’au dénouement.

 

JohnSteinbeck_crop

   John STEINBECK écrit dans sa préface : « Si cette histoire est une parabole, peut-être chacun en tirera-t-il sa propre morale et y découvrira-t-il le sens de sa propre vie. »

     S’il laisse le lecteur libre de choisir la morale à tirer de la tragédie vécue par Kino, la formule de la fable permet àl’auteur-conteur d’orienter celui-ci vers sa vision de la société et la nature humaine. Le point de vue de John STEINBECK est terriblement pessimiste : il souligne les perversions de l’une et les noirceurs de l’autre.

     John STEINBECK a reçu Le prix Pulitzer en 1942 et le Prix Nobel de Littérature pour l’ensemble de son œuvre en 1962.

1) Georges DUHAMEL (1884~1966) est un écrivain français. Il fut membre du groupe de l’Abbaye, Il participa comme médecin à la Première Guerre mondiale. Il fut auteur de poésie, de théâtre, de nouvelles, de nombreux romans, de mémoires et fut critique littéraire au Mercure de France, chroniqueur littéraire à Candide, au Figaro.

Georges DUHAMEL était membre de l’Académie de Médecine (1937). Il est entré en 1944 à l’Académie des Sciences morales et politiques et fut Président de l’Alliance française de 1937 à 1940.

Élu à l’Académie française en 1936, il en fut Secrétaire perpétuel de 1944 à 1946.

Il était Grand Croix de la Légion d’honneur.

Source de l'image :

http://fr.wikipedia.org/wiki/Fichier:JohnSteinbeck_crop.JPG

 

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6 septembre 2012

Lyonel TROUILLOT (1956) – La belle amour humaine (2011)

Lyonel TROUILLOT (1956) – La belle amour humaine (2011)

      À la recherche du passé d’un père trop tôt disparu, Anaïse vient séjourner quelques jours en Haïti. La jeune fille est accueillie par Thomas que son oncle a chargé de la conduire à Anse-à-Fôleur. Sept heures de voyage les séparent de leur destination, un petit village de pêcheurs au nord-est de l’île, où enfant et adolescent, le père d’Anaïse passait les vacances d’été avec ses parents et son parrain.

     Dès le départ, Thomas se lance dans un long monologue. Plusieurs thèmes s’enchevêtrent dans ses propos : une vision lucide, réaliste et réservée à la fois, de la vie en Haïti et du rapport de son pays au monde ; un catalogue humoristique et caricatural des touristes en visite ou en séjour dans l’île ; une enquête criminelle non élucidée sur la disparition dans un incendie de deux personnages emblématiques des fléaux qui ont touché la société haïtienne ; une réflexion sur le sens de l’existence, la solidarité et la convivialité au sein du village.

     Anaïse sera bien reçue à Anse-à-Fôleur, le mieux qu’il est possible dans un village privé des éléments du confort moderne, prévient son chauffeur. N’est-elle pas un peu une des leurs ? Comme le petit monsieur de la capitale venu enquêter dans ce trou perdu, vingt ans plus tôt, il lui faudra  renoncer à apprendre ce qui s’est passé la nuit de l’embrasement qui a détruit les Belles Jumelles, causant la mort de leurs propriétaires, deux crapules, deux prédateurs que rien n’arrêtait. Les victimes : Pierre André Pierre, une brute despotique, démoniaque, d’une cruauté sans bornes pour faire plier autrui à ses exigences ; son ami, le machiavélique homme d’affaires véreux, Robert Montès,  grand-père d’Anaïse. Au village,  personne n’a rien vu ni entendu cette nuit là. « Laissez les choses à leur mystère ». « Voilà ce qu’ils te diront ».

     Anaïse logera chez l’oncle de Thomas, le célèbre portraitiste Frantz Jacob. Devenu aveugle, lui, qui avait toujours vécu dans le bruit et l’agitation de la capitale, goûte le calme et le dénuement du village, méditant face à l’océan tout en s’entretenant peinture avec Solène. Le vieil homme  est à l’agonie. Peut être sera-t-il déjà mort quand ils arriveront ? Elle verra. Il lui faudra aussi rencontrer Justin, le législateur autodidacte.

     Paradoxalement, par son écoute, la jeune fille, quoique silencieuse, est une interlocutrice active. Thomas parle, s’arrête, s’assure qu’elle prête toujours l’oreille, poursuit son discours, la teste. Ses propositions de modifications d’itinéraires n’ont pas d’écho, il reprend la parole. La passagère somnole, il se tait. Les mots coulent à nouveau… « Au fait, je ne sais ni qui tu es ni ce que tu veux, Mais j’ai aimé faire la route avec toi. Seulement, au retour, c’est toi qui parleras. ».

     Les trois quarts du roman de cette première partie, ont pour titre « Anaïse ». Dans la deuxième partie intitulée « Thomas », la jeune fille parle enfin, Thomas écoute. Le contenu de son intervention révèle la sincérité de leur échange. Les coupures de l’écrit en chapitres plus ou moins courts, les fins de page vides de mots, une page tournée sur une autre entièrement vierge entre deux chapitres rendent crédible ce dialogue étrange entre les deux personnages. On imagine sans peine que pendant ces temps de silence, le conducteur a l’attention retenue par la conduite du véhicule sur une route accidentée, que dans la traversée d’un paysage monotone, il laisse vagabonder ses pensées et mûrit sa prochaine intervention.  

     Dans la troisième partie, « la belle amour humaine », la communication entre eux sera si profonde que les mots seront superflus. Anaïse, a trouvé sa place parmi les habitants d’Anse-à-Fôleur, participe à la fête rituelle du passage vers l’au-delà du vieux peintre. Sa place, elle la trouve aussi dans le tableau allégorique de « la belle amour humaine » de Frantz Jacob, de Solène et de Thomas.

*****

     Dans son entretien avec le journaliste de RFI, Pascal Paradou (1), Lyonel TROUILLOT confirme s’être inspiré du colonel tristement célèbre dans l’histoire haïtienne, Albert Pierre, ancien directeur de la police politique de la dictature de Jean-Claude Duvalier(2), et avoir assemblé les traits de quelques hommes d’affaires haïtiens bien réels  de la bourgeoisie mulâtre pour créer le personnage de Robert Montès.

     La situation du pays  est présentée du point de vue d’un Haïtien par la voix de Thomas vers Anaïse, venue d’un pays du nord. Un appel est lancé aux occidentaux : écoutez-nous ! Ne venez pas chez nous seulement pour assouvir vos fantasmes, réaliser vos rêves d’exotisme, jouir de nos plages paradisiaques et entretenir vos certitudes ! Imaginons ensemble les remèdes à la situation économique et sociale en Haïti. Gardez vos solutions en kit inadéquates !

     Un message d’espérance est adressé aux haïtiens eux-mêmes à travers la petite communauté d’Anse-à-Fôleur. Débarrassée de ses oppresseurs, celle-ci refuse le ressassement de ses malheurs, la quête de victimes expiatoires. Elle reste sourde aux chants séduisants des sirènes de l’exil, à l’attrait du superflu, aux artifices du factice. Isolée, oubliée, tournée vers le futur, elle prend en charge son destin, applique les préceptes de convivialité et d’entraide de « la belle amour humaine », concoctés par Justin, son législateur bénévole. Chacun a une place unique, est irremplaçable, respecte le sage, l’artiste, le vieillard, l’enfant. Une utopie ? Peut être !  Mais quel message d’espoir en l’humanité!

Notes :

1 – Pascal Paradou présente avec le concours de Pascal Pons, chaque jour « Culture Vive » sur RFI, un rendez-vous culturel sur l’activité artistique dans les capitales du monde et raconte la culture telle qu’elle se vit en France. Source : http://www.rfi.fr/emission/culture-vive

2 – La dictature de Jean-Claude Duvalier (né en 1951), dit Bébé-Doc, a duré de 1971 à 1986. Jean-Claude Duvalier avait succédé à la Présidence de la République haïtienne à la mort de son père surnommé « Papa-Doc.

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