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8 janvier 2012

Diane DUCRET – Femmes de dictateur (2011)

Diane DUCRET – Femmes de dictateur (2011)


     L’intransigeance de leur conviction d’homme providentiel, leur discours enflammé, ont subjugué une coterie de partisans,  galvanisé les foules, conquis les hommes, déchaîné l’adulation des femmes. Hormis Salazar (1889~1970) qui est resté discret et mesuré et s’est tenu éloigné des photographes, Mussolini (1893~1945), Lénine (1870~1924), Staline (1878~1953), Bokassa (1921~1996), Mao (1893~1976), Ceausescu (1918~1989), Hitler (1889~1945), se sont prêtés à la mise en scène, souvent sans limite, du culte de leur personnalité. Tenants d’un pouvoir, à tout prix sans partage, ils ont marqué le siècle des conséquences de leur tyrannie sur le sort de millions d’êtres humains.
     L’étude des biographies déjà publiées de ces personnages, les souvenirs rapportés par des témoins directs de scènes auxquelles ils ont assisté ou de propos tenus en leur présence, ajoutés à des extraits des journaux intimes, de lettres des différents protagonistes, constituent la base de la documentation des récits concernant chacun de ces autocrates. Les références sont citées dans les notes à la fin de du livre.
     Diane DUCRET passe en revue ces dictateurs du vingtième siècle et dresse une galerie de portraits de celles qui furent leurs compagnes et maîtresses. Les 341 pages de l’ouvrage se lisent comme un roman, mais ne peuvent se résumer comme tel.


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Les égéries
      Mussolini serait « resté un petit activiste de parti, un révolutionnaire du dimanche »(1), sans Angelina Balabanof (1878~1951), aristocrate ukrainienne, passionaria de la révolution bolchevique et féministe. L’«hystérie, la misère et le désespoir »(2) caractérisaient l’exilé romagnol, cet «être humain avec un air aussi pitoyable » qui assistait au meeting organisé par le parti socialiste italien à Lausanne en 1904. Elle l’a dégrossi. Après une relation de presque dix années, elle le délaissera  pour Lénine. Une autre militante socialiste d’avant-garde croira en son avenir politique et lui donnera les moyens culturels et financiers de réaliser ses ambitions.  Il s’agit d’une jeune femme issue de la grande bourgeoisie, l’écrivain, journaliste de la rubrique artistique puis codirigeante avec Benito du journal l’Avanti, Margherita Sarfatti (1880~1961). Une attirance passionnelle les rapproche doublée d’une relation intellectuelle privilégiée. Elle affinera la culture et la rhétorique de cet être frustre. Ils élaboreront ensemble et diffuseront la première version de la doctrine fasciste. Il rompt avec elle en 1934. Margherita est juive comme Angelina. Elle quitte le pays à la promulgation des mesures de discrimination et de persécution à l’encontre des Juifs italiens des « Lois raciales » de 1938.

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     Vladimir Ilitch Oulianov était déjà un fils gâté par sa mère et aidé par sa sœur aînée Anna.  Le futur Lénine, sera soutenu par des femmes dans son errance de prison en exil puis à la direction du Kremlin. Elles assumeront le quotidien, l’assisteront dans la propagande et sa lutte révolutionnaire. Lénine, Nadia Krupskaïa son épouse (1869~1939) marxiste convaincue, qui a traversé les glaces de Sibérie au péril de sa vie pour le retrouver, le suivre en exil, et la très chic révolutionnaire, féministe, prophétesse de l’amour libre, Inessa Armand (1874~1920), formeront un ménage à trois pendant six ans.

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   Dans les années vingt, le déluge verbal d’Hitler, fondateur du NSDAP (Nationalsozialistische Deutsche Arbeiterpartei, parti ouvrier allemand national-socialiste) galvanise la gente féminine. Séduite par sa force de conviction, la riche Helen Berchstein le prend en main, améliore sa garde-robe, lui apprend à s’habiller en toute circonstance, l’initie aux bonnes manières et au savoir-vivre en usage dans la bonne société, lui donne ainsi le moyen de s’ouvrir les portes de l’ancienne aristocratie prussienne et de la bourgeoisie déçues par la République de Weimar.

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Les épouses et les compagnes
     Mussolini demande en mariage Rachele Guidi (1890~1979), encore mineure, révolver au poing. Vite rassasié, l’amant impétueux ne tardera pas à chercher aubaine ailleurs. L’épouse et mère de ses enfants exerce sur l’ex-révolutionnaire belliqueux une tyrannie domestique à laquelle il se plie, prisonnier de la propagande du régime célébrant la famille. Le Duce se consolera dans les bras de quantité de jeunes maîtresses.

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     La nuit du 15 juillet 1906, Ekaterina Svanidze (1880~1907) et Iossif Vissarionovitch Djougachvili sont mariés clandestinement par un prêtre complaisant. Le prétendant romantique, a charmé Kato en poussant la chansonnette et déclamé ses poèmes. Le futur Staline est de petite taille, a le teint olivâtre marqué par la petite vérole, ses vêtements sont en loques. Se doute-t-elle que la vie d’inquiétude qui l’attend auprès d’un chef de bande brutal, révolutionnaire traqué, braqueur de banques (pour la cause, bien sûr !), recherché pour meurtre d’agents du tsar ? Presqu’un an et demi plus tard, Kato meurt du typhus dans les bras de Staline qui en est très affecté.
     Staline avait sauvé de la noyade Nadia Allilouyeva (1901~1932), sa seconde épouse quand elle avait six ans. Il la viole à 18 ans, dans le train où, chargé  de faire céder la ville encore inféodée au tsar de Tsaritsyn(3), il a installé son QG, en 1918. À Moscou, Nadia déprime dans l’enfer du huis clos et de la promiscuité du Kremlin, qui abrite les héros de la Révolution et leur famille et où règne la suspicion. Les dissensions au sein du couple, la paranoïa, l’ivrognerie, les mensonges, les tromperies de Iossif, acculeront Nadia au suicide. Dans un état d’ébriété, il venait de la provoquer et de l’injurier devant tous les dignitaires du régime. Genia, sa belle-sœur ayant repoussé ses avances, il la fera déporter et emprisonner. Elle intégrera un asile d’aliénés après sa libération.
     Le « petit père des peuples » terminera son existence en compagnie d’une femme plus docile, presqu’illettrée, Valentina Istomina, sa gouvernante, qui l’accompagne dans tous ses voyages et sert discrètement dans les repas officiels.

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     Jean-Bedel Bokassa eut une carrière matrimoniale instable et bien remplie! Dix-neuf épouses et quarante enfants sont référencés(4). Il y eut des divorces, des abandons, des fuites. L’empereur autoproclamé de Centrafrique Bokassa 1er devient polygame. Bien avant son coup d’État, le chef d’état-major de l’armée centrafricaine avait une manière très particulière de faire sa cour : enlèvements, séquestrations, unions sans leur consentement de très jeunes filles !
     Catherine Denguiade, qu’il couronne impératrice au cours d’une cérémonie grandiose, vivra ainsi l’enfer d’un mariage imposé, sans liberté de mouvement jalousée des autres épouses et des maîtresses occasionnelles. Elle vit cloitrée aussi bien au palais Berengo qu’à Bangui. Toute visite, toute sortie est soumise au bon vouloir du souverain paranoïaque, jaloux, suspicieux, bambocheur, assoiffé de domination. De sa réclusion, la jeune femme perçoit la nature destructrice du régime de son époux. Elle sermonne, résiste, tient tête, tempère et si besoin laisse hurler le forcené à la porte de ses appartements.
     Les représailles de Bokassa seront terribles pour le Président de la République française Giscard d’Estaing, après l’opération « Barracuda », en 1979. Ses affirmations aux médias français lancent « l’affaire des diamants ». Elles pèseront en France, sur la campagne présidentielle de 1981. Catherine, dépressive, prend ses distances avec Jean-Bedel qui ne dessoûle pas, finit par trouver refuge en Côte d’Ivoire. Malgré les dénégations de son épouse, il clame à tous qu’elle a eu une aventure amoureuse avec  Giscard.

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     Yang Kaihui (1901~1930) a 17 ans la première fois qu’elle rencontre Mao Zedong. Ils deviennent amants quelques mois avant de se marier à la fin de 1920. Mao, de huit ans plus âgé, avait déjà épousé Luo Yixiu (1889~1910). Il ne renonce pas pour autant à ses anciennes liaisons, prend même de nouvelles maîtresses. La lutte politique l’absorbe. Il s’absente convertir les foules et vit avec une jeune femme rencontrée en route. Trois ans durant, sans nouvelles de lui, Kaihui l’attend à Changsha, avec ses trois enfants. En septembre 1930, il revient pour... assiéger la ville toujours nationaliste. Kaihuil, est arrêtée avec son fils de huit ans, crie sa loyauté envers Mao, avant mourir décapitée.
     La nouvelle compagne de Mao, He Zhizen (1909~1984), est une militante communiste active. Tous deux sont considérés comme mariés en 1928. Mao n’est pas un homme fidèle. L’entente du couple se disloque rapidement. En octobre 1934, Mao lance la Longue Marche qui fera de lui un mythe. Zhizen, marquée par la perte successive de trois de ses quatre fils, enceinte de cinq mois, prend donc la route. En février 1935, elle accouche à l’écart du convoi d’une petite fille qu’elle est contrainte d’abandonner, reprend la marche aussitôt, soigne et sauve les blessés. Mao, indifférent, poursuit sa marche vers le pouvoir suprême. Atteinte au cours d’une attaque aérienne, Zhizen survit, mais garde des éclats d’obus dans le corps. La désormais martyre de la Révolution, enceinte à nouveau, quitte les combattants, gagne seule, à pied, l’Union soviétique où elle est soignée. Le garçon qu’elle met au monde ne vit pas une année. Mao a pris une autre femme. Abandonnée, brisée par les épreuves, Zhizen perd la raison, est internée. Rapatriée par Mao en Chine en 1947, elle sera à nouveau enfermée jusqu’à sa mort en 1984.
     La quatrième et dernière épouse du Grand Timonier, (1914~1991) est d’une toute autre espèce. Née dans une famille pauvre, elle cherche non seulement à sortir de sa condition, mais, guidée par une ambition démesurée, elle utilise tous les moyens possibles afin de favoriser son ascension et écarter tous les obstacles. À vingt-trois ans, elle a déjà roulé sa bosse lorsqu’elle rejoint la Longue Marche en 1937 à Yan’an et s’emploie à séduire Mao. Comédienne ratée, actrice de série B, communiste à l’origine par opportunisme, mariée utilement déjà trois fois, Jiang Qing a une réputation sulfureuse. Mao écarte les mises en garde et les critiques de l’état major du parti communiste chinois, passe outre l’inquiétude des militants. D’abord dans l’ombre, chargée de son secrétariat privé, Jiang Qing gravit les échelons du pouvoir, impose ses conceptions artistiques au comité directeur de l’industrie cinématographique. Devenue conseillère culturelle de l’armée, elle se met en scène et se compose un personnage de leader respecté. Actrice majeure de la Révolution culturelle des années 60 et 70, elle assouvit enfin une vengeance longuement murie sur ses ennemis. Elle veille elle-même au choix et à l’initiation de jeunes pucelles chargées de satisfaire la libido frénétique du Grand Timonier. Mao disparu, détestée de tous, associée à « la bande des quatre », elle est arrêtée et jugée pour ses forfaits.  Sa condamnation à mort sera commuée en prison à vie, elle se suicidera dix ans plus tard, en 1991.

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     Le 23 décembre 1947, le mariage entre Nicolae Ceausescu et Elena (1916~1989) est signé sur de fausses déclarations. La mariée s’est rajeunie de deux ans et se prénomme en réalité Lenuta. Ex-tôlard, entré en politique après avoir partagé son enfermement avec des agitateurs communistes, Nicolae avait remarqué cette fille pleine d’aplomb, meneuse des luttes ouvrières et des manifestations antiroyaliste avant la guerre. Au lendemain de l’accession de Ceausescu au poste de secrétaire général du Parti communiste roumain, Nicolae régit la politique tandis que, sans scrupule, Elena usurpe une légitimité universitaire en chimie, et prend en main tous les instituts de recherche du pays. Les Roumains lui doivent l’interdiction de la contraception et des décrets régissant la vie intime des couples. Qui n’est pas à sa botte est implacablement limogé. Elle fait mettre ses rivales sur écoute, échafaude les pièges pour les compromettre. La Guerre froide aidant, elle collectionne une multitude de distinctions honorifiques décernées par des universités étrangères et accable les services diplomatiques de ses caprices protocolaires et d’exigences en cadeaux dispendieux dans ses voyages officiels. Le 25 décembre 1989, la fête est finie pour le Génie des Carpates et son épouse Elena. Ils seront fusillés dans la base militaire de Targoviste, condamnés à mort par un tribunal autoproclamé à la suite d’un procès secret expéditif.

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Les maîtresses
      Comme Hitler, Antonio de Oliveira Salazar a renoncé au mariage. Anne DUCRET nous révèle que la réalité est bien différente de l’être chaste, exclusivement marié à la patrie décrit par la propagande du régime. Encore jeune séminariste sans vocation, il est troublé par Felismina, une adolescente rousse au caractère bien trempé. L’éducation religieuse qui diabolise le sexe entrave l’attirance mutuelle des jeunes gens. La jeune fille est tourmentée entre désirs et sentiment de culpabilité. Une relation platonique ambigüe s’installe entre les jeunes gens. Felismina, nommée inspectrice des écoles, sera une informatrice privilégiée du dictateur, pratiquera au besoin la délation et sera une propagandiste zélée du salazarisme.
     La plupart des nombreuses liaisons du Doutor furent sans conséquences. Sa vie sentimentale le portait vers des femmes souvent mariées, bien différentes du prototype salazariste d’épouse et mère au foyer. Telles Maria-Laura Campos, jeune femme émancipée, Emilia Vieira, originale, danseuse mondaine, bisexuelle, voyante, qui sera son astrologue jusqu’à la fin, Mercedes de Castro Feijo, aventurière, fille de diplomate, héritière prodigue convertie au journalisme. Salazar craint l’inconstance de la passion, aussi ne s’engage-t-il jamais.
     Une femme émancipée, Christine Garnier, journaliste française, fut sa plus grande passion au point de lui offrir des bijoux de valeur, de lui faire adresser, où qu’elle soit, fleurs et fruits exotiques. Pour elle aussi, disparaîtront les rendez-vous avec l’être aimé.

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     On a du mal à imaginer Hitler amoureux. Il le fut pourtant ! On a du mal à imaginer le Führer séducteur. Il le fut pourtant ! Des femmes tombèrent sous le charme du peintre raté, admirateur de danseuses et de modèles nus. L’éloquence frénétique et la fougue du discours du chef du parti nazi déchaînait les passions féminines.
     Enthousiasmée par sa verve, l’épouse de Siegfried Wagner, Winifred, lui fait parvenir en prison lettres et colis de nourriture. Bien qu’on ne sache rien de la nature exacte de sa relation avec Hitler, elle n’hésitera pas à s’afficher avec lui au point de nourrir les rumeurs.
     Il est des histoires d’amour qui finissent mal
     A Berchtesgaden, en 1927, les parents de la pauvre Maria Reiter (1911~1992) « Mitzi » amoureuse délaissée par Herr Wolf (5) sauvent leur fille in extremis  de la pendaison.
Au moment où le parti nazi connaît sa grande ascension, Hitler est déstabilisé par le suicide de la souriante Angelika Raubal (1908~1931), sa nièce.  « Geli » se tire une balle dans la poitrine pour se sortir de l’enfermement d’une relation incestueuse avec Onkel Alf.
    Eva Braun (1912~1945), la charmante « bécasse », d’abord substitut de Geli s’attachera définitivement Alfi par deux tentatives de suicide. Installée au Berghof, elle y règnera en maîtresse de maison dans le cercle intime du chancelier du Reich. Entretenue volontairement sans contact avec l’extérieur, sur ordre du Führer, Effie mène une vie de petite fille gâtée dans une bulle dorée. Elle rejoindra cependant son Alfi dans Berlin assiégé. Dans le bunker où ils se sont enfermés avec les derniers fidèles, Hitler prend Eva pour épouse l’avant-veille de leur suicide.
     Dans une pièce voisine, celle qui fut « le versant féminin d’Hitler », la première dame du régime, « modèle de sa race », mère modèle, celle dont l’amour pour Hitler est si fort, qu’elle lui a offre sa vie, Magda Geobbels (1901~1945), suit le Führer dans la mort quelques heures plus tard.

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     Des femmes s’offraient à ces dictateurs, en témoignent les extraits des Lettres d’amour à un dictateur cités dans l’introduction de l’ouvrage.
Si les lettres enflammées de ces femmes mettaient le Führer mal à l’aise, le Don Juan de la botte italienne, lui qui se vantait à ses maîtresses, d’avoir commencé sa vie sexuelle par le viol de sa jeune voisine, ne se gênait pas pour y donner suite. Le Duce ne lésine pas sur les moyens de se débarrasser d’une ancienne maîtresse hystérique engrossée, à qui il avait promis le mariage. Il la fait enfermer. Sa dernière maîtresse Clara Petacci suivra son amant jusqu’au bout, quand il sera exécuté par les partisans italiens.

Notes :
1-    Mussolini
2-    Angelina Balabanof
3-    Tsaritsyn future Stalingrad
4-    Réf. mysite.verizon.net/respzyir/jean-bedel-bokassa/id4.html (anglais).

pour accéder à la traduction en français de cette référence cliquez sur le lien

Les_epouses_de_Bokassa


5-   Hitler se cachait sous ce pseudonyme, lorsqu’il était encore chef du parti nazi. C’est sous ce nom qu’il faisait la cour à ses conquêtes d’alors.

Pour revoir le documentaire de France 2 : APOCALYPSE HITLER:

Apocalypse Hitler Fr2Cliquez ICI

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